Fiche n° 98 : La Brume des Spectres (Les Guerres de l'Ombre et de la Lumière 1) de Janny Wurts
Résumé :
Lysaer et Arithon sont demi-frères mais tout les oppose. L’un est un prince éduqué pour hériter d’une couronne et possède le don de lumière ; l’autre a été élevé par les mages et domine les ténèbres. Séparés par les affres cruelles d’une guerre de sang, ils se vouent une haine féroce. Pourtant un événement prodigieux va les forcer à se supporter et peut-être à s’entendre…
Emportés par un portail magique vers un monde inconnu, on les y accueille comme de véritables sauveurs : seule l’alliance de leurs pouvoirs peut triompher de la Brume des Spectres qui a plongé le monde d’Athera dans l’obscurité. Mais ce n’est pas le seul enjeu, comme les sorciers de la Fraternité des Sept le savent parfaitement. Car entre les mains des demi-frères qui se déchirent reposent l’équilibre du monde, son harmonie et son avenir.
Informations complémentaires :
http://www.critic.fr/detail_livre.php?livre=29688
Mon avis :
Les qualités de la Trilogie de l'Empire viennent-elles toutes de Janny Wurst ? Telle est la question que l'on en vient à se poser au vu de la qualité de la trilogie qu'elle a co-écrite avec Feist par rapport au reste de l'oeuvre de ce dernier. Avec Les Guerres de l'Ombre et de Lumière, Janny Wurts commence une série ambitieuse comme ont pû le faire Jordan, Feist ou Drake avant elle, pas toujours avec le même succès il est vrai. Sa saga se décline en différents arcs qui, s'ils ne peuvent se lire indépendament, ont au moins le mérite d'apporter une conclusion satisfaisante sans être définitive...
Voici, pour vous donner une idée de la chose, le récapitulatif de la série telle qu'elle a été éditée outre-atlantique :
Arc I
Curse of the Mistwraith (1993)
Arc II
Ships of Merior (1994)
Warhost of Vastmark (1995)
Arc III - Alliance of Light
Fugitive Prince (1997)
Grand Conspiracy (1999)
Peril's Gate (2001)
Traitor's Knot (2004)
Stormed Fortress (2007)
Arc IV - Sword of the Canon
Initiate's Trial (à paraître)
Destiny's Conflict (à paraître)
Et il y aura un cinquième arc.
Impressionnant, non ? Mais qu'en est-il de la présupposée qualité de la série ?
Après la déception de la série de son compatriote Drake, ce premier tome de Janny Wurts m'a surpris en bien. Attention : n'attendez pas de l'auteur qu'elle révolutionne le genre, vous risquez d'en avoir pour vos frais !
Néanmoins, avec La Brume des Spectres commence une série ambitieuse, plaisante et au risque de ma répéter classique, qui plaira aux fans de Feist comme à ceux de Jordan.
Poursuivons, si vous le voulez bien, par une citation tirée du prologue de l'ouvrage qui éclaire de façon appréciable les enjeux du livre mais aussi de la saga.
(...) A cette époque, Arithon, surnommé le maître de l'Ombre, combattit le seigneur de la Lumière pendant cinq siècles de conflits âpres et sanglants. S'il faut en croire les canons de la religion fondée durant cette période, le seigneur de la Lumière était une divinité incarnée, et le maître de l'Ombre le serviteur d'une entité malfaisante tissant de sombres complots. (...)
Mais certaines preuves laissent entendre que le maître est injustement rangé dans les forces du mal. (...) Que chaque lecteur détermine en son âme et conscience ou se situent le bien et le mal.
Voici typiquement le genre de prologue qui met la barre très haut.
En effet, non content d'attiser la curiosité de son lecteur, l'auteur promet ni plus ni moins d'éviter le manichéisme (typique des longues séries de fantasy), ou à tout le moins, d'inverser les clichés ombre / méchants et lumière / gentils. De là découle toute l'intrigue qui joue sur l'opposition entre les deux frères : l'un préfère l'art et la magie tandis que l'autre favorise l'épée et la politique. Un seul point les rapprochent : la haine de l'autre demi-frère. Pas évident donc, pour l'un comme pour l'autre, de mettre leurs différents de côté (surtout que ceux-ci sont bien ancrés en eux) pour sauver un monde (qui n'est pas le leur) en proie à une brume éternelle. Surtout qu'un lourd destin pèse sur eux deux... Ils ne sont que des pions sur un vaste échiquier dont personne ne connaît les participants.
Après avoir dévoré les 700 et quelques pages du roman, deux constats s'imposent :
- il convient d'abord de saluer le talent indéniable de l'auteur, conteuse d'histoire douée et écrivaine émérite. La Brume des Spectres confirme tout les qualités entrevues dans La Trilogie de l'Empire sans attendre la qualité de celle-ci. Avec cette grande saga, la carrière (solo) de Janny Wurts ne fait que commencer. En tout cas, c'est tout ce que je lui souhaite !
- Néanmoins, toutes les promesses n'ont pas été tenues. Ainsi, il m'apparaît important de souligner que le manichéisme n'a pas été éradiqué de l'ouvrage, loin de là. J'aurais aimé un livre où les deux personnages s'affrontent sans qu'il soit possible de dire lequel des deux représente le bien. Libre au lecteur de choisir son camp par la suite, si seulement il décide de le faire. J'espère me tromper mais il me semble improbable voire impossible que des lecteurs choisissent des camps contraires. En effet, il me semble que l'un des deux personnages est complètement raté et que bien peu de lecteurs souhaiteront se rallier à lui (je ne dis pas qui pour ne pas guider votre lecture). Dommage. Surtout que c'est à ce niveau que j'attendais l'auteur après la lecture du prologue.
7/10 J'ai longtemps hésité avant de mettre la note. Elle aurait tout aussi bien pu avoir un demi-point supplémentaire. Au final, le seul défaut de ce solide premier tome lui évite d'être un excellent début mais certainement pas d'être un bon livre car disons-le clairement : cette série est prometteuse.
Simatural