Fiche n° 599 : Le Huit de Katerine Neville
Couverture :
Résumé :
New York, décembre 1972 : Catherine Velis, jeune experte en informatique, est une spécialiste des échecs. Alors qu'elle se prépare à partir en Algérie travailler pour l'Opep, des événements mystérieux se succèdent. C'est d'abord une vieille femme qui la prévient des dangers qui rôdent autour d'elle, puis un antiquaire qui lui demande de rassembler les pièces d'un jeu d'échecs très ancien dont une bonne partie serait dissimulée en Algérie... Sud de la France, printemps 1790 : Mireille de Rémy et sa cousine Valentine sont novices dans l'abbaye fortifiée de Montglane. Alors que la révolution bat son plein, la Mère supérieure les charge d'une étrange mission : disséminer à travers le monde les pièces du jeu d'échecs de Montglane, qu'un Maure aurait offert à Charlemagne. Celles-ci, réunies, renfermaient un secret qui donnerait accès à une terrible puissance. Les deux cousines partent alors pour Paris où sévit la terreur. Le Huit nous propose de suivre les destins parallèles de Mireille de Rémy et de Catherine Vélis, depuis les alcôves révolutionnaires parisiennes, où se livrent d'étranges luttes de pouvoir, jusqu'aux cercles fermés qui, à notre époque, contrôlent l'énergie et l'économie. --Ce texte fait référence à une édition épuisée ou non disponible de ce titre.
Informations complémentaires :
http://www.critic.fr/detail_livre.php?livre=36150
Mon avis :
Pour changer de lecture, je me suis plongé dans un thriller intitulé « Le Huit », de Catherine Neville. Un polar qui après tout, flirte quelque peu avec le fantastique. La base de la trame scénaristique a beau être historique, puisqu’il s’agit de l’histoire d’un jeu d’échec apparu à l’époque de Charlemagne, les pouvoirs mystiques qui semblent l’entourer rehausse l’aspect ésotérique global. Ce qui est appréciable, c’est justement d’avoir une toile de fond propice à l’imaginaire, fine et subtile, pour servir le suspense.
D’un point de vue construction, j’avoue être un bon client des histoires réalisées en parallèles, qui permettent une meilleure compréhension du sujet traité par l’auteur, et qui donnent une certaine dynamique à l’ensemble de l’ouvrage. En l’occurrence, nous voguons ici entre la fin du XVIIIème siècle, avec la période de Grande Terreur engendrée par la révolution française et le début des années 1970, où l’OPEP prend son essor. Quel lien entre ces deux périodes me direz-vous ? Et bien, dans les deux cas, nous avons ce fameux jeu d’échec comme point focal. D’un côté, une mystérieuse abbesse, qui voit son « antre » mise sans dessus-dessous durant cette époque houleuse pour le clergé, mettre en place un stratagème pour déloger le secret qu’elle gardait précieusement entre ses murs, qui n’est d’autre que le Jeu de Montglane. Le déloger certes, mais surtout pour le cacher à nouveau, l’éparpiller même, de manière à ce qu’aucun ne remette la main dessus avant longtemps… De l’autre côté, nous avons Catherine Velis, une pro de l’informatique qui pour des raisons qui de prime abord semblent être des coïncidences, se voit rentrer dans le Jeu et partir travailler pour l’OPEP.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit, un Jeu, où la récompense espérée est assez captivante pour canaliser les ressources de nombreux illustres personnages d’antan. Et c’est là où j’ai trouvé le plus de plaisir lors de cette lecture. En effet, au fil des pages, commence à se dessiner toute la mécanique usitée par l’auteur, où personnages rôles et actions sont décrits telles les pièces d’un jeu d’échec. C’est une course de longue haleine, l’équipe des blancs, contre l’équipe des noirs, chacun luttant pour obtenir la victoire. L’échiquier n’est rien de moins que l’ensemble de la planète ; les pions, cavaliers, tours, reines, rois ou autres fous se dispatchant dessus, mais toujours cachés au sein de la société ainsi que de nos propres élucubrations.
La volonté de Catherine Neville de se reposer sur les tactiques des échecs pour faire avancer ses personnages est un risque qu’elle a su maîtriser. Les échecs sont évidemment traités du début jusqu’à la fin, mais nous comprenons vraiment ses implications sur les personnages qu’à partir d’un certain moment, qui se calque sur la connaissance du personnage principal de la toile qui l’entoure et la resserre…
Ce pavé de 960 pages (version poche) se lit malgré tout assez rapidement, pour peu que vous ne soyez pas hermétique à la thématique abordée. J’avais un a priori concernant l’écriture, craignant après avoir lu un avis parlant de « thriller intelligent », qu’elle aurait été complexe. En fait, il n’en est rien, ce côté « intelligent » venant plutôt du sujet choisi, signifiant par là qu’il n’est pas question d’un thriller sur psychopathe en manque d’hémoglobine. En outre, ce jonglage entre les deux époques narrées offre une petite bouffée d’oxygène si jamais l’une d’entre elles finirait par vous lasser, bien que je n’aie souffert à titre personnel d’aucun ennui d’aucune sorte.
7/10 Pour reprendre une licence plus connue, on pourrait rapprocher « Le Huit » du « Da Vinci Code » pour ce côté thriller ésotérique. A la différence près que les ordres religieux n’interviennent ici que de façon marginale, pour laisser place plutôt à des corporations plus modernes (économique, politique, juridiques etc.) mais toujours sous fond de mysticisme. Une histoire qui a dû plaire à un grand nombre, puisqu’une suite « Le feu sacré » fut sortie l’an dernier, que je lirai lors de sa version poche (publiée le 1er avril 2010).
SebO