Fiche n° 709 : Esprit, es-tu là ? (Chambres noires 1) de Bleys et Dumont
Couverture :
Résumé :
Paris, 1877. Dans le studio de « photographie fluidique » de la famille Pénouquet, des bourgeois s’entretiennent avec leurs parents défunts puis posent en leur compagnie. Ce n’est bien sûr qu’un trucage : Louise et Tristan, les jumeaux adoptifs de la maison, se griment en spectres pour tromper les clients. Mais un jour, le visage d’un vrai fantôme apparaît sur les clichés… Au même moment, les jumeaux sont enlevés par une obscure confrérie royaliste, la Salamandre. Quel lien établir entre cette disparition et l’intrus surnaturel sur les photos ? La famille Pénouquet mène l’enquête !
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Mon avis :
Parmi les membres de la famille Pénouquet, difficile de trouver le plus étrange. Le patriarche, artiste légèrement évaporé, la fille, qui communique avec les esprits, les jumeaux adoptifs, joyeux bambins qui jouent les fantômes sur les photos des clients, ou bien la petite dernière, une gamine muette qui n’a pas son pareil pour lire sur les lèvres ? À moins que ce ne soit l’oncle Arsène, le doyen flanqué de son homme de compagnie, un asiatique ramené des colonies, avec qui il projette d’extraire l’or de la Seine. Ou encore Lazare, le jeune photographe un peu trop intellectuel, un peu trop rêveur… Non, définitivement, le plus étonnant des personnages, ce doit être la mère, une énergique défunte qui communique à travers un portrait que son mari retape régulièrement.
Bref, vous l’aurez compris, personne n’est tout à fait normal chez les Pénouquet. Et heureusement, puisque leur petit studio photo ne survit que grâce à une spécialité bien particulière : ici Ninon, l’ainée, vous permet d’entrer en contact avec les esprits, avant que Lazare ne vous photographie avec eux afin « d’immortaliser » cette rencontre. Ce sont alors les jumeaux qui entrent en scène, histoire de truquer le cliché. Cette entreprise familiale de gentille escroquerie, bien que peu rentable, est bien rodée et chacun connaît son rôle. Jusqu’au jour où les choses changent. Un véritable esprit se présente à eux alors que, de leur côté, les turbulents jumeaux ont disparu. Toute la famille se lance alors à la recherche de réponses dans une maison close, dans une vieille baraque de fête foraine, ou encore à l’abattoir…
Visuellement aussi, on est loin du réalisme. Et c’est tant mieux. Les héros ont des allures de monstres ectoplasmiques, les corps ondulent et les couleurs explosent, vives et inquiétantes… Le rendu est impeccable, dans un style qui n’a certes rien d’absolument inédit, mais qui fonctionne ici à merveille.
Tant dans le scénario que dans le traité graphique, Bleys et Dumont nous offrent ici un sympathique album, quelque part à mi-chemin entre la Famille Adams et les meilleurs Tim Burton. C’est donc aux inconditionnels du fantastico-sinistro-délirant que s’adresse avant tout Chambres Noires. Si c’est votre cas, foncez ! Sinon, vous risquez de vous y perdre… Un bémol quand même. Ceux qui, comme moi, ont une fâcheuse tendance à pester devant une fin d’album qui ne sert qu’à faire attendre le suivant, seront ici particulièrement frustrés.
7/10 Amoureux des univers décalés et gentiment outre-tombesques, Chambres Noires est pour vous. Une histoire, une ambiance, un style… tout y est. « Esprit, es-tu là » amorce avec panache une série qui s’annonce inévitable, mais nous laisse cruellement sur notre fin en attendant la suite.
Cyrielle...