Fiche n° 774 : Les Pilleurs d'Âmes de Laurent Whale

Publié le par Librairie CRITIC

Couverture :

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Résumé:
1666...
« Les grosses balles de plomb claquent sur le bois de la chaloupe. Je prends conscience que j'ai de l'eau jusqu'aux chevilles.
Peu importe : c'est un voyage à sens unique.
Plonger, tirer, plonger, tirer...
Un choc sourd. Nous avons touché.
— Lancez les grappins ! À l'abordage ! »


Suivez les pas de Yoran Le Goff
dans ce trépidant roman d'aventures où espionnage
intergalactique se mêle à la flibuste du XVIIè siècle,
et à ses marins gouailleurs !

Informations complémentaires : ICI

Mon avis :
Alors avorton, tu crois en avoir assez dans tes braies pour devenir l’un des nôtres. Un vrai frère de la côte, ayant pour seul but de poutrer de l’espagnol, remplir tes fouilles et les dilapider en rhum, jeux et autres bordels avant un autre abordage ? Comment ça t’es pas de chez nous ? D’un monde plus évolué tu dis ? M’en cogne, tant que tu plonges, tires, plonges, tues, tires, survis, tires pour notre noble cause, je me moque bien d’où tu peux débarquer. D’ailleurs je ne suis pas censé le savoir alors trêves de palabres, car toi lecteur, tu t’en rendras compte bien assez tôt.

La piraterie a toujours été pour moi source d’évasion. Un monde cohérent, qui a vraiment existé, propice aux aventures les plus folles, où l’imaginaire côtoie les faits d’armes les plus épiques. Toujours est-il qu’appréhender cet univers est risqué, tant les codes, la culture, le phrasé lui sont propres. De ce point de vue là, n’ayez crainte les mousses, Laurent Whale a bien étudié en amont, et cela se ressent fort logiquement tout au long du récit. Que ce soit en mer lors de missions, ou sur la terre ferme dans les tavernes, on hume avec délice les relents que nous offrent ces différents tableaux. Les protagonistes se meuvent en parfaite adéquation dans ces derniers, si bien qu’on s’immerge avec facilité et désireux d’en connaître davantage sur la tournure prise par cette histoire pas piquée des hannetons. Car c’est bien là le tour de force voulu par Capt’aine Whale.

Vous l’aurez compris, dans ce roman sont mélangées deux composantes. L’histoire réelle du 17ème siècle, lieu et époque de notre récit, mais également un futur « lointain et ailleurs », symbolisé par la présence de Yoran LE GOFF. Embrigadé dans sa mission interstellaire, il se voit néanmoins quelque peu dépassé par les évènements. Obligé par moments de réagir à l’instinct, de manière à ne pas compromettre sa couverture, il s’écarte de ses standards opérationnels habituels, où l’analyse prime sur l’action. Mû par un tiraillement émotionnel, où le comportement des humains locaux déteint sur lui, il s’implique de plus en plus dans l’Histoire de cette terre qui n’est pas la sienne. Pensant de prime abord avoir affaire à des barbares sanguinaires, son regard évoluera avec le temps, mais surtout au contact de ces nouveaux camarades, où les notions de bravoure, couardise, stratègie et discipline n’étaient pas ceux auxquels il aurait pensé initialement.

Qui dit roman d’aventure, dit plume dynamique. D’autant plus lorsque le roman se veut condensé. C’est donc sur 200 pages bien rythmées que nous suivons les pas de Yoran. Pour ce qui est de l’écriture, deux éléments m’ont paru importants d’être noté, et qui corroborent ce style énergique. Tout d’abord, des phrases courtes. Elles ne le sont pas toutes, heureusement, mais elles permettent d’apporter une cadence soutenue. Cette vision parcellée mais fluide de Yoran nous plonge dans l’action, qu’elle soit active ou passive. Elle colle par ailleurs bien à la méthodologie qu’emploie notre matelot en herbe. Enfin, et cela n’engage que moi, mais j’apprécie souvent les regards caustiques qu’ont les différents personnages d’une situation. En l’occurrence, c’est le cas ici par le biais de Yoran, qui a pour lui en outre une vision plus évoluée de la vie, de par son profil « galactique ». Son adaptation à la flibusterie, qu’il s’agisse de l’armement, des mentalités ou du confort somme toute spartiate, est passée au vitriol. Il ne le dit pas avec dédain, mais les situations, et sa prise de recul par rapport à ce qu’il connait « ailleurs » en font ressortir certaines remarques non dénuées d’humour noir.

7,5/10 Savant alliage de piraterie et de science-fiction par l’intermédiaire du héros, transposé dans cet univers brutal pour remplir à bien sa mission, Les Pilleurs d’Âmes est un roman d’aventure original. Son écriture dynamique, les remarques caustiques, le tout servi dans un cadre très bien retranscrit permet une immersion rapide dans cet environnement haut en couleur. Une suite dans cet univers ne serait pas illogique, car à n’en pas douter, on imagine aisément d’autres explorations … « plus loin et ailleurs ».

SebO

Publié dans Critiques SF

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